Définition du terme :
Le Doute en Psychologie : Définition et Approches pour le Gérer
Une Définition Large du Doute en Psychologie
En psychologie, le concept de « doute » est abordé sous diverses facettes, allant de l’expérience subjective du patient à la posture épistémologique du praticien et du chercheur. Il ne s’agit pas seulement d’une incertitude, mais d’une dimension inhérente à la complexité de l’esprit humain et de son étude.
- Le doute peut émerger chez le patient, par exemple lorsqu’il redoute que son état dépressif ne s’aggrave en se concentrant sur des pensées négatives [1]. Dans ce contexte, il représente une interrogation sur l’efficacité de la démarche thérapeutique elle-même [1].
- Dans le domaine de la recherche et de la théorie, le doute se manifeste par l’absence de « formules magiques » ou de « théories irréfutables et précises » pour interpréter des phénomènes complexes comme le langage non verbal ou pour détecter le mensonge [2]. Des chercheurs ont exprimé des doutes quant au succès de la combinaison de différentes approches théoriques, comme la psychanalyse et le behaviorisme [3].
- Pour le psychologue, le doute est considéré comme une « posture » nécessaire dans la pratique. Il est la « conscience morale de la connaissance » [4], impliquant une rigueur dans l’observation et la vérification des impressions, tout en restant ouvert à la nouveauté [5]. Cette posture est cruciale pour éviter les dérives d’analyse, notamment en psychologie clinique et psychopathologie [4].
- Le doute est également lié à l’hétérogénéité et la fluidité des concepts et des classifications en psychopathologie. Par exemple, la psychologie et la psychiatrie cliniques ont souvent focalisé sur la notion de personnalité plutôt que sur les concepts plus insaisissables de sujet ou d’identité, soulignant la difficulté à les définir précisément [6]. De même, les frontières entre le normal et le pathologique varient selon les cultures, les contextes sociaux et familiaux, rendant le jugement sur un comportement « anormal » sujet à interprétation et donc à doute [7].
Méthodes pour Gérer le Doute en Psychologie
Plutôt que de chercher à éliminer le doute, la psychologie propose des approches pour le gérer, l’intégrer, et même en faire un levier d’amélioration et de compréhension.
- Redéfinition de la démarche cognitive : Pour les patients qui doutent de l’efficacité de la thérapie, il est essentiel de redéfinir la démarche cognitive pour leur montrer qu’elle favorisera le développement d’alternatives de pensées et la mise à distance émotionnelle vis-à-vis des conclusions absolues [1]. L’auto-enregistrement des cognitions aide à cette prise de distance [1].
- Apprentissage continu, expérimentation et amélioration : Face à l’absence de théories irréfutables ou de solutions toutes faites (par exemple, pour analyser les gens ou déceler un mensonge), la psychologie invite à « continuer à apprendre, à expérimenter et à s’améliorer » [2].
- Adoption d’une posture réflexive et critique : Les psychologues sont encouragés à développer une « posture de doute et d’ouverture à la nouveauté » [5]. Cela implique un processus de réflexivité, de prise de recul, et d’identification des biais personnels, cognitifs et affectifs [5]. Dans l’analyse qualitative, l’« exercice du doute » est recommandé pour éviter les dérives et favoriser la réflexion et la discussion plutôt que des explications toutes faites [4].
- Promotion d’une approche intégrative et plurielle : Plutôt que de s’enfermer dans une « vérité unique » et absolue, la complexité psychique peut être mieux appréhendée par la pluralité des approches théoriques et cliniques [8]. L’intégration des différentes approches de la psychopathologie, bien que difficile, est considérée comme salutaire car elle protège des commodités de pensée [9]. La psychologie positive, par exemple, cherche à articuler diverses méthodologies, de l’expérimentale à l’observationnelle, pour une compréhension plus complète [10].
- Distinction entre nosographie et nosologie : Dans l’étude des troubles, il est préférable d’utiliser une « nosologie » (classification méthodique des maladies et de leurs critères) plutôt qu’une « nosographie » stricte (classification descriptive), pour rendre compte d’une dynamique psychique sous-jacente et de sa modélisation psychopathologique [11]. Ceci permet de dépasser les limites des classifications catégorielles rigides [12].
En somme, le doute en psychologie n’est pas un obstacle à contourner, mais une composante active de la démarche scientifique et clinique, poussant à une exploration plus profonde et nuancée de la réalité psychique.