Définition du terme :
EMDR (Désensibilisation et Retraitement par les Mouvements Oculaires)
Définition de l’ « EMDR »
L’EMDR, acronyme de l’anglais « Eye Movement Desensitization and Reprocessing » (en français : « désensibilisation et retraitement par le mouvement des yeux » ou « désensibilisation et reprogrammation par le mouvement oculaire ») [1-3], est une approche psychothérapeutique [3-7]. Bien que son nom d’origine fasse référence aux mouvements oculaires, l’appellation « EMDR » a été conservée même si la méthode ne se limite plus uniquement à cette technique [3, 7].
Origine et fondement :
- L’EMDR a été découverte fortuitement en 1987 aux États-Unis par Francine Shapiro, une psychologue californienne [3, 7-9]. Shapiro a observé sur elle-même qu’une anxiété d’origine traumatique pouvait disparaître grâce à des mouvements oculaires [8, 9].
- Elle a ensuite publié la première étude scientifique contrôlée en 1989 [10-12].
- Le concept central de l’EMDR est le Modèle du Traitement Adaptatif de l’Information (TAI ou AIP) [13-18]. Ce modèle postule l’existence en chacun de nous d’un mécanisme inné de « digestion » des traumatismes émotionnels [13]. Lorsque ce processus naturel est bloqué par des événements traumatiques, l’EMDR vise à le relancer et à le faciliter [16, 17].
Mécanisme d’action :
- L’EMDR utilise la stimulation sensorielle bilatérale, qui peut prendre la forme de mouvements oculaires, de stimuli auditifs (sons alternés) ou de stimulations tactiles (tapotements alternés sur les genoux ou les épaules) [2, 19, 20].
- Ces stimulations sont censées permettre une résolution rapide des symptômes liés aux événements traumatisants [2].
- Le mécanisme d’action est souvent lié aux mouvements oculaires rapides (REM) qui se produisent pendant le sommeil, connus pour leur rôle crucial dans le traitement et la consolidation des souvenirs émotionnels et traumatiques [21]. L’EMDR modifierait l’activité de réseaux cérébraux impliqués dans le traitement émotionnel et la mémoire, comme le précuneus, et peut normaliser le sommeil des patients souffrant de TSPT [21].
- La thérapie implique une « double attention » : le patient se concentre sur l’image ou le souvenir perturbant tout en restant ancré dans le présent grâce à la stimulation bilatérale [22, 23]. Cela permet au souvenir d’être retraité et intégré sans être revécu de manière accablante [23].
- Le processus EMDR aide le cerveau à inscrire l’événement dans la mémoire narrative et à le considérer de manière neutre [24]. Il permet également de développer de nouvelles façons de penser sans nécessairement « supprimer » les anciennes [25].
- Bien que l’EMDR puisse induire des états de conscience modifiés, les formateurs affirment que la technique les évite grâce à la double attention, bien que la recherche sur les ondes cérébrales n’ait pas toujours confirmé que cet état n’est pas présent durant le processus EMDR [22, 26].
Applications et efficacité :
- L’EMDR est principalement reconnue pour le traitement du Trouble de Stress Post-Traumatique (TSPT) [2, 5, 7, 11, 12, 18, 27-32].
- Son efficacité a été scientifiquement prouvée par de nombreuses études contrôlées depuis 1989 [12, 28].
- Depuis 2013, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) la préconise comme traitement de première intention pour les troubles psychotraumatiques, tant chez les adultes que chez les enfants [11, 12, 18, 28]. Elle est également reconnue par de nombreuses organisations de santé internationales et nationales (e.g., American Psychologist Association, INSERM, HAS) [12, 28, 33].
- Elle est considérée au moins aussi efficace que les meilleurs traitements existants, et souvent mieux tolérée et plus rapide [30].
- Elle est également utilisée pour traiter d’autres problématiques telles que :
- Les deuils [28, 34, 35].
- Les phobies et les attaques de panique [28, 36].
- Les troubles dissociatifs [28, 37-40].
- Les troubles anxio-dépressifs et la dépression [41-43].
- Les conséquences négatives de maladies (ex: troubles cardio-vasculaires, cancer) et les troubles du comportement alimentaire [18, 42].
- Le développement et la potentialisation des ressources positives des patients, s’inscrivant dans le domaine de la psychologie positive [44-47].
- Certaines études en neuro-imagerie ont montré des modifications cérébrales (ex: augmentation de l’activation du lobe préfrontal, diminution de l’activité de l’amygdale) après traitement EMDR [48-51].
Déroulement du traitement :
- La thérapie EMDR suit un protocole structuré en huit phases : histoire du patient, préparation, évaluation, désensibilisation, installation, scanner corporel, clôture et réévaluation [52, 53].
- Le travail se déroule généralement en « trois temps » : ciblage et retraitement des souvenirs du passé, puis des déclencheurs du présent, et enfin des scénarios du futur pour consolider les acquis [54, 55].
- Le praticien EMDR intervient comme un facilitateur, ne médiatisant pas le contenu, car le patient est considéré comme l’expert de son problème et de sa résolution [16].
- Des protocoles adaptés existent pour des situations spécifiques, comme le « protocole des lettres » pour les affaires relationnelles non terminées [56-58] ou le « flashforward » pour les scénarios futurs redoutés [59].
Précautions et considérations :
- L’EMDR doit être pratiquée par un professionnel de la santé mentale certifié (psychiatre, psychologue, psychanalyste ou psychothérapeute), ayant suivi une formation et une supervision rigoureuses accréditées par l’Association Européenne d’EMDR [4].
- Il n’y a pas de contre-indication formelle à la thérapie EMDR, mais des précautions sont à prendre, dépendant de la qualité et de l’efficacité du thérapeute [44].
- L’EMDR est généralement interdite pendant la grossesse et ne peut être pratiquée que par un spécialiste [19].
- La téléthérapie EMDR (à distance) est possible, mais nécessite des protocoles spécifiques, une explication claire au patient, et l’obtention d’un consentement éclairé écrit, ainsi que les coordonnées des services d’urgence proches du patient [60-62].