Les Schémas Amoureux en Psychologie : Définition, Méthodes de Préservation et Références Clés
1. Définition des « Schémas Amoureux »
En psychologie, les « schémas amoureux » peuvent être compris comme des modèles profonds, souvent inconscients, de pensées, d’émotions, de comportements et de relations qui se développent au fil du temps et influencent la manière dont un individu perçoit, interagit et se comporte dans le cadre des relations romantiques [1, 2]. Ces schémas ne sont pas de simples sentiments passagers, mais des structures fondamentales de la personnalité qui déterminent des scénarios relationnels récurrents [2].
- Ces schémas sont intrinsèquement liés aux « histoires d’amour » personnelles que nous construisons tout au long de notre développement, influencées par les récits qu’on nous a transmis (par exemple, les contes de fées), les modèles que nous avons eus (par exemple, les parents, les héros de films), et nos conversations avec autrui [3]. Bien que personnelles, ces histoires sont souvent limitées au sein d’une culture donnée, car partagées par un grand nombre de personnes [3].
- La tendance à tomber « sans cesse en amour » peut être vue comme une sensation d’ordre hypnotique, où l’individu se complaît dans un univers imaginaire, utilisant le mirage de l’amour comme un moyen de fuir une réalité perçue comme trop brutale ou pour faire abstraction de la pression du quotidien [4]. Pour certains, l’« amour extrême », l’état amoureux, ou le coup de foudre, peut s’apparenter à un état régressif où l’objet de l’amour prend la place de l’idéal du Moi [5].
- Certains schémas amoureux peuvent prendre une forme dysfonctionnelle, voire addictive, présentant des similitudes avec les dépendances aux substances. On parle alors d’« addiction amoureuse », caractérisée par une euphorie et un désir incoercible en présence de l’objet d’amour, une humeur triste ou une anhédonie en cas de manque, une focalisation de l’attention et des pensées intrusives, et la poursuite de comportements problématiques malgré la connaissance de leurs effets négatifs [6]. Ce comportement est parfois décrit comme une « compulsion de répétition » [7].
- Sur un plan plus profond, la vie amoureuse et la passion qu’elle sous-tend peuvent impliquer le recours à des fonctionnements psychologiques primaires et archaïques, tels que des aspirations fusionnelles ou des pulsions prégénitales [8]. Ce qui devient pathologique n’est pas le recours à ces fonctionnements archaïques, mais l’incapacité d’y renoncer et l’impossibilité d’accéder à l’ambivalence, menant à un déni prolongé de la réalité [8].
- La notion du « sexuel » (différent de la sexualité en tant que comportement) renvoie à un éprouvé subjectif interne, à la place des pulsions dans le processus psychique, et constitue un modèle de notre rapport subjectif interne à l’autre et à nous-même, influençant la manière dont les expériences sont « introjectées » et intégrées psychiquement [9].
En somme, les schémas amoureux sont des constructions psychiques complexes et dynamiques, façonnées par l’histoire personnelle et le contexte socio-culturel, qui orientent de manière significative nos expériences et nos difficultés dans le domaine affectif et relationnel [3, 8, 10].
2. Principales Méthodes pour les Préserver ou les Contenir
La gestion et la modification des schémas amoureux dysfonctionnels s’inscrivent dans une démarche psychothérapeutique visant à restaurer un équilibre et un bien-être relationnel. Plusieurs approches sont pertinentes :
2.1. Approches Thérapeutiques Spécifiques
- Thérapie des Schémas (Jeffrey Young) : Cette approche intégrative est spécifiquement conçue pour identifier et modifier les schémas inadaptés et les « modes » (réseaux de composants cognitifs, affectifs, motivationnels et comportementaux) qui sous-tendent les difficultés de personnalité, y compris les problématiques relationnelles et les addictions amoureuses [1, 2, 11]. Elle intègre des éléments des thérapies comportementales et cognitives, de la théorie de l’attachement, de la Gestalt-thérapie, du constructivisme et de la psychanalyse [1].
- Psychothérapies d’inspiration psychanalytique : Elles visent à comprendre les mécanismes inconscients sous-jacents aux schémas répétitifs, notamment l’importance du passé personnel, de la sexualité et des expériences individuelles [12]. Elles travaillent sur la subjectivité inconsciente, les pulsions, les mécanismes de défense et les conflits internes qui peuvent se manifester dans les relations amoureuses [13-16]. L’analyse du transfert et du contre-transfert est cruciale pour explorer les dynamiques relationnelles [13, 17].
- Thérapies Comportementales et Cognitives (TCC) : Elles aident à identifier et à modifier les pensées pathogènes (distorsions cognitives) et les comportements inadaptés associés aux schémas amoureux, en enseignant de nouvelles approches des situations et en favorisant une restructuration cognitive [13, 18].
- Thérapies Systémiques et Familiales : Elles analysent les rôles, les interactions et leurs effets réciproques au sein du système de couple ou familial. Elles considèrent les difficultés relationnelles individuelles comme le reflet d’une pathologie familiale ou des systèmes plus larges dans lesquels la personne est située [13, 19-21].
- Thérapie EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing) : Si les schémas amoureux problématiques sont liés à des blessures relationnelles ou des traumatismes passés, l’EMDR peut être utilisée pour le retraitement des informations stockées de manière dysfonctionnelle, contribuant ainsi à une résolution adaptative [22-24].
- Hypnose Profonde : Permet d’explorer et de travailler avec les processus psychologiques inconscients qui sous-tendent les schémas amoureux. Elle peut aider à accéder à des ressources internes et à modifier les perceptions ou les comportements en relation [25-29]. En sexologie, l’hypnose est utilisée pour aborder les difficultés liées à la conscience des sensations et des émotions dans l’intimité [30].
- Médiations Thérapeutiques : L’utilisation de médiations non verbales (art-thérapie, etc.) peut être utile, notamment lorsque le langage parlé est insuffisant pour exprimer les affects ou les problématiques liées au narcissisme et à l’identité. Ces médiations activent la figuration de pensées et d’états affectifs peu accessibles, favorisant la symbolisation et la flexibilité psychique [31-35].
2.2. Principes Généraux de Préservation
- Développement de la conscience de soi et de l’affirmation de soi : Comprendre ses propres fonctionnements et mécanismes de défense, et développer la capacité à s’affirmer dans les relations [36, 37].
- Régulation émotionnelle : Apprendre à réguler les émotions intenses, une compétence essentielle pour la santé mentale et relationnelle, particulièrement pour les « personnalités instables de façon stable » [38].
- Accès à l’ambivalence et à la réalité : Dépasser la rigidité et le déni prolongé de la réalité qui caractérisent les schémas pathologiques, pour développer la capacité à tolérer et intégrer des aspects contradictoires des relations et de soi-même [8].
- Recherche de sens : L’exploration du sens de la vie, de la solitude et de la liberté peut contribuer à un bien-être psychologique global qui influence positivement les relations [39].
- Focus sur les ressources et les capabilités : S’orienter vers l’activation des ressources personnelles et le développement des potentialités, au-delà de la simple focalisation sur les pathologies [40].
3. Bibliographie Limitée aux 20 Auteurs les Plus Importants
Voici une sélection de 20 auteurs dont les travaux sont fondamentaux pour la compréhension des schémas amoureux et des approches psychothérapeutiques qui peuvent y être appliquées, en se basant sur les sources fournies :
- Jeffrey E. Young [1, 11, 18, 41]
- Aaron T. Beck [1, 2, 18, 42-50]
- Sigmund Freud [5, 7, 9, 14-16, 21, 22, 35, 42, 43, 47, 49, 51-88]
- Melanie Klein [37, 38, 42, 52, 56, 61, 66, 84, 88-94]
- René Roussillon [9, 31-33, 60-62, 84, 93, 95-107]
- Serban Ionescu [10, 12, 56, 108-169]
- Jean Laplanche & Jean-Bertrand Pontalis [16, 56, 59, 61, 62, 101, 120, 122, 170]
- Donald W. Winnicott [51, 61, 84, 95, 171]
- André Green [42, 61, 69, 71, 72, 84, 91, 93]
- J.-D. Nasio [4, 46, 123, 172]
- Martin E. P. Seligman [173, 174]
- Francine Shapiro [18, 22, 175]
- Antoine Bioy [26, 27, 131, 134, 176-178]
- Otto Kernberg [38, 52]
- Jean Bergeret [7, 37, 38, 52, 71, 84, 86, 116, 117, 120, 123, 172, 179-182]
- Philippe Pinel [21, 63]
- Henri Ey [75, 183, 184]
- Ludwig Binswanger [111, 185]
- Lee (1977) [3]
- Robert J. Sternberg (et coll.) [3]